Le blog de Martineau & Mindicanu

Évaluation automatisée ou conseil personnalisé?

J’ai lu des dizaines de fois « ne dépense pas ton argent avec un consultant ou avocat en immigration parce que toute l’information se trouve sur Internet et les sites officiels du gouvernement ont des évaluations gratuites qui te disent si tu peux immigrer ou pas ». Les deux évaluations les plus utilisées sont celle de l’assistant Venir au Canada de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) et l’Évaluation préliminaire d’immigration du Québec. Bien qu’elles aient une belle conception et soient bien pensées, elles ont souvent des erreurs, les mises à jour tardent, l’information y est difficile à comprendre et manque de clarté, et dans plusieurs cas ces évaluations ne savent offrir ni explication ni alternative en cas de réponse négative.

Et comment pourrait-il en être autrement? L’immigration est très complexe, les lois, règlements et instructions ministérielles changent chaque semaine et les candidats à l’immigration ont des profils variés et uniques. De plus, puisque les programmes fédéraux et provinciaux d’immigration sont régis par des lois, règlements et procédés différents, les gouvernements n’ont pas juridiction pour évaluer un candidat à la lumière des autres programmes fédéraux et provinciaux. Comment donc pourrait-on attendre d’un système informatisé qu’il remplace un être humain au moment d’évaluer votre projet d’immigration et de vous donner des conseils quant au meilleur chemin à suivre pour mener ce projet à bien?

Analysons la première évaluation en ligne, l’assistant Venir au Canada, du point de vue de quelqu’un qui souhaite immigrer de façon permanente au Canada.

Nous pouvons par exemple lire la question « Avez-vous une offre d’emploi écrite de la part d’un employeur au Canada? ». Dans le cas où l’offre d’emploi ne serait pas permanente et que le candidat n’aurait pas travaillé au Canada pendant au moins deux ans, la réponse de l’évaluation serait négative. Ce serait une réponse juste puisque qu’en effet, en ce moment, le candidat ne peut pas se qualifier en pareil cas. Toutefois, dans le cas où une personne aurait travaillé légalement quelques mois avec un contrat de travail de 6, 12, 24 mois ou plus, plusieurs programmes provinciaux pourraient donner accès à la résidence permanente. Si cette personne continuait à travailler quelques mois, elle pourrait bien se qualifier à un programme fédéral d’immigration dans un futur rapproché. C’est donc dire que tel un robot, l’évaluation en ligne dira (dans le cadre de certains paramètres) si oui ou non, il est possible de se qualifier mais en cas de réponse négative, le système ne saura pas montrer de chemins possibles pour accéder à la résidence permanente.

À l’inverse, il est possible d’avoir une réponse positive dans cette évaluation, sans vraiment être éligible. Par exemple, si quelqu’un a travaillé au Canada pendant deux ans à raison de 30 heures par semaine, le résultat de l’évaluation en ligne sera positif mais en fait, deux années de travail à 30 heures par semaine ne permettent pas de se qualifier à la résidence permanente sous un programme fédéral (du moins pas au moment d’écrire ces lignes, cela pourrait changer ce 1er juillet 2012).

D’ailleurs plusieurs indices nous font penser que le 1er juillet, dans moins de trois semaines, les programmes d’immigration fédéraux changeront de façon draconienne. Je suis curieux de savoir combien de temps l’assistant Venir au Canada mettra à être adapté à ces changements. Même lorsqu’il le sera, il conservera les inconvénients que je mentionne dans cet article.

L’évaluation préliminaire d’immigration du Québec a elle aussi ses défauts, surtout dans le cadre des changements des derniers mois. En ce moment, si un candidat ne répondait pas aux exigences actuelles de la Ministre de l’Immigration, il aurait tout de même un résultat positif s’il atteint un nombre suffisant de points à la grille de sélection (Vous semblez satisfaire aux critères de sélection du Québec). Un texte informera qu’une décision de la Ministre de l’Immigration a été prise au sujet des demandes d’immigration, mais sans explication adaptée au candidat ayant rempli l’évaluation en ligne. Cela et un message disant qu’on semble satisfaire aux critères de sélection est confus et contradictoire.

D’autre part, des question importantes aidant à déterminer si un candidat pourrait obtenir un Certificat de Sélection du Québec seraient à savoir s’il a récemment travaillé pendant une année ou plus dans la province dans un niveau d’emploi technique, universitaire ou administratif, ou s’il étudie ou travaille présentement dans la Belle province. Les questions au sujet des séjours au Québec ne considèrent pas des cas possibles et importants dans l’évaluation en ligne, laquelle a été créée à une époque où certains programmes actuels n’existaient pas encore.

Voyons aussi le cas d’une personne qui n’atteindrait pas un pointage suffisant, mais pour qui il existe diverses manières d’obtenir un CSQ éventuellement. Si cette personne remplit l’évaluation préliminaire, sa réponse sera qu’il lui est déconseillé de soumettre une demande de certificat de sélection. C’est une réponse probablement juste et correcte, toutefois une analyse plus approfondie pourrait conduire à conseiller différentes manières d’obtenir le CSQ, par exemple en améliorant son niveau de français et d’anglais, en complétant un diplôme ou en venant temporairement travailler ou étudier au Québec.

Malgré leurs limites, les évaluations en ligne des gouvernements fédéral et du Québec ont le mérite de donner aux candidats une bonne idée générale de certaines options. Surtout, les programmeurs et designers des départements des TI qui les ont conçues méritent des applaudissements. Mais rappelons-le, il existe près de 70 programmes d’immigration permanente, les règlements, processus et exigences changent constamment, et une démarche d’immigration comporte des centaines de détails et de subtilités. Le simple fait de déterminer si des points peuvent être octroyés au facteur domaine de formation, pour le Québec, ou de déterminer si un candidat a une expérience de travail qui le rendra éligible au programme régulier de travailleur qualifié fédéral, peut être ardu. Et tout cela est sans mentionner les questions d’interdiction de territoire pour criminalité, de problèmes de santé ou de séjour illégal au Canada, entre autres thèmes. Une consultation personnalisée permettra de trouver réponse à toutes vos questions, ce que ne peut pas faire une évaluation en ligne.

Il est tout simplement impossible qu’un système informatisé puisse apporter un conseil adéquat, complet et personnalisé, basé sur votre profil académique, professionnel, d’affaires et familial, ainsi que sur toute la dimension humaine de votre projet.

Dans certains cas, il est possible que les robots remplacent les humains, mais l’immigration n’est pas un de ceux-là.

Note: Même si l’opinion exprimée dans cet article touche les professionnels de l’immigration canadienne, mon opinion personnelle n’implique que moi et le bureau Martineau & Mindicanu. De plus l’usage du masculin dans le texte inclut aussi bien les femmes que les hommes.

Image de fuckupz.wordpress.com

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2 réponses

  1. Bonjour,
    J´habite a Cuba, et j´ai fait les études en Tourisme, 5 ans a l´Université de l´Havane. Je n´ai pas trouvé un domaine de formation semblable dans la liste, par contre, j´ai consulté le site de la UQAM e j´ai trouvé la carriére Gestion Du Tourisme au Quebec dont la description est très semblable a celle de Cuba. Ce qui me pose des doutes c´est que au Quebec le grade octroyé par cette carrière est le Bachelier en Administration des Affaires (BAC 3-ANS). Je me demande alors, si jamais je mettrais dans ma demande de certificat de séléction ce domaine de formation, acquerirrais je les 6 points ou les 2 en cas de conjoint? Merci d´avance pour votre aide.
    Carlos

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